Le Dégoût! Comment faire avec? Chapitre III ( y compris le dégoût de Soi…)

 

Psychothérapie du Dégoût, Psychothérapie de la Culpabilité, Psychothérapie de la Dépression, Psychothérapie de l'Angoisse.
Pascal Acklin Mehri, Psychologue Psychothérapie Paris

 Le dégoût, comment faire pour l’apprivoiser?(Chap III)

Maintenant que vous avez lu les deux premiers chapitres (le Dégoût, à quoi ça sert?), vous êtes plus au clair avec l’intérêt qu’il peut y avoir à prêter un peu plus attention à vos ressentis de dégoût lorsqu’ils émergent à l’intérieur de vous. Parce qu’il s’agit d’un phénomène universel qui vient vous informer en profondeur sur un processus naturel capital qui va vous guider vers une plus grande connaissance, une plus grande conscience de vous-même et de vos besoins authentiques. Reste à savoir maintenant comment faire pour y prêter attention, et pour apprivoiser la sensation corporelle du dégoût, alors même qu’elle est en général, au début, plutôt désagréable, très désagréable voire  franchement insupportable…

1) Prêtez attention en toute sécurité en écoutant ce dont vous avez besoin comme conditions pour l’apprivoiser et le traverser dans les meilleures conditions possibles…

J’ai dores et déjà développé certains aspects de la méthodologie à suivre au Chapitre III de la question de l’Angoisse et Chapitre III de la question de la Culpabilité. Et de la même manière pour le dégoût, l’accueil se fait dans le corps une fois que l’on s’est placé(e) dans une situation suffisante de confort et de sécurité, avec dans le meilleurs des cas un accompagnant, sinon sans. Il suffit alors de se laisser traverser en portant la meilleure attention possible à chaque bribe de sensation, et le voyage commence. Et que se soit désagréable ou agréable, chaque événement sensoriel même le plus en apparence contradictoire, fait partie du voyage. Respecter vos rythmes personnels, si c’est trop insupportable, prenez un temps, une pause, acceptez que les décrochages, quelles que soient leurs formes (y compris toutes les interventions du mental qui cherche en général à vous divertir du pur ressenti en les interprétant ou en les jugeant constamment…). Tout ce qui vous arrive est OK, même de ne pas y arriver, faites pause et retournez-y plus tard dans ce cas. Apprivoiser veut dire « se rapprocher par aller-retour, par réduction progressive de la distance avec vos émotions les plus intenses ». De toute façon la répétition est une clé que vous pouvez soit décider volontairement, mais dans les meilleures conditions possibles, soit être condamné à subir avec toutes les répétitions intempestives de ces états désagréables, et ceci souvent dans les situations les moins propices, telles que vous aviez l’habitude de les vivre jusqu’à présent.  

Progressivement par l’augmentation de la durée de l’état d’attention consciente portée aux sensations corporelles (sans interprétations), cela peut suffire, quelque fois presque « magiquement », à en traverser les effets, comme on traverse une tempête. Ceci pour aller vers quelque chose de beaucoup plus calme par la suite, un lieu intérieur de plus grande sécurité avec la part de soulagement qui va avec. Comme je l’ai déjà dit, il pourra aussi être nécessaire de faire plusieurs traversées pour que les bénéfices s’installent plus durablement, mais vous verrez qu’à chaque fois vous devenez comme un jeune marin, toujours plus habile à la manoeuvre. Il est d’ailleurs intéressant de constater qu’accueillir ses émotions et les traverser ou se laisser traverser par elles est un processus qui renforce considérablement la confiance et l’estime de soi.

2) Prenez le temps de décrire le plus précisément possible ce que vous êtes en train de vivre dans votre corps et vos émotions, mettez une forme à vos sensations…

Dans ce processus d’écoute de Soi, il va être très intéressant, en même temps, de décrire ce qui se passe, pendant la durée d’entrée en contact attentif avec vos sensations corporelles, que ce soit par l’écrit ou par la parole, ou tout mode d’expression (dessin, musique…). Cela vous aidera à maintenir votre attention et à mettre des mots ou des formes sur ce que d’habitude vous subissiez sans jamais, jusque-là, avoir vraiment pris le temps de l’explorer. Chaque description, chaque métaphore ou mise en forme vous aide à reprendre un peu de maîtrise de ce qui se passe. Un peu comme si, au début pour commencer, vous mettiez enfin un drap qui lui donne forme, à cet invisible fantôme qui vous terrorisait. Désormais, il se peut qu’il vous fasse pour l’instant toujours peur, mais vous commencez à le localiser  et le « voir » plus clairement, et cela change quelque chose…

Pour la partie description verbale, comme je le pratique en thérapie, il s’agit en gros de trouver des images verbales (métaphores) qui permettent de mieux décrire donc d’apprivoiser le phénomène et de le partager avec quelqu’un. Par exemple, dans le cas du dégoût, si je ressens de la nausée, je ne m’arrête pas là, et cela peut devenir: « C’est comme si quelque chose restait bloqué dans ma poitrine ou dans ma gorge, quelque chose qui voudrait sortir et qui pousse dans toutes les directions de ma gorge ». Plus on y passe de temps et plus cela peut devenir plus clair, plus précis, laissez vous conduire par les mots qui vous viennent, par exemple: « C’est comme s’il s’agissait d’un gaz opaque dense et lourd, qui me pèse, c’est très désagréable, pas douloureux mais très gênant… »; et puis un peu plus loin, l’attention suivant l’évolution des sensations, la description devient encore plus claire: « Cela devient plus chaud, ça pousse avec un gout âcre et acide, je sens que cela me donne envie de vomir.. »; et puis encore un peu plus loin « Je ressens de la colère, et de l’impuissance, comme un blocage, une membrane, dans ma gorge, qui empêche que cela sorte… ». Notez qu’à chaque instant il peut y avoir des « va et vient » comme des formes de rapprochement ou d’éloignement avec les sensations ou émotions, ce n’est pas grave, c’est normal, votre organisme, votre psyché apprivoise par allers-retours… 

3) Où l’on peut passer des mots aux images, et des images à l’imaginaire inconscient…

Expérimentez par vous même, laissez vous un peu surprendre et voyez où cela vous mène. Et quand vous en êtes là de votre processus d’écoute, pour passer de la métaphore verbale aux images, il n’y a qu’un pas… C’est pourquoi maintenant nous allons développer ici un aspect complémentaire de tout ce processus d’écoute,  qui concerne le travail sur les représentations imaginaires en liens avec les sensations corporelles. Ces représentations imaginaires sont des productions de l’inconscient qui vous aident, si vous acceptez de vous laisser surprendre et guider par elle, à organiser et métaboliser, vers des possibilités de solutions, tous les processus corporels énergétiques et émotionnels par lesquels vous allez accepter de vous laisser traverser. Ce ne sera pas forcément le cas pour tout le monde, mais les images mentales qui vous viennent dans de tels moments peuvent devenir un formidable atout si vous ne forcez rien et que vous les laissez vivre et évoluer d’elles-mêmes. Par exemple, souvent quand la personne en face de moi est déjà dans le processus, je lui demande de laisser venir dans son imaginaire les images qui pourraient le mieux correspondre a ce dont elle à besoin au vu de ce qu’elle vient de me décrire de ce qui se passe dans son corps.

Si nous reprenons l’exemple lié au dégoût de tout à l’heure, au moment où le besoin de vomir se fait plus fort, cela pourrait donner par exemple :  » Je me vois en train de vomir toutes mes tripes, sur la table de repas familial, sur le pied de mon boss ou sur mon lieu de travail… ». Ici aucune image même la plus irrationnelle n’est malvenue du point de vue des bienfaits thérapeutiques et du soulagement qu’elle apporte, ainsi : » je me vois me transformer en une espèce de dragon et je crache du feu ou de la lave tout autour de moi ou sur une personne précise… ». Pour ceux qui ne l’ont pas encore vécu, vous n’imaginez pas comme cela peut faire du bien de se relâcher ainsi ouvertement dans son imaginaire. Bien sûr il se peut, du fait de culpabilités résiduelles plus ou moins importantes, qu’accepter de se voir emporter dans de telles scènes imaginaires, pourtant salvatrices, soit difficile au début. Il n’y a, là encore, rien à forcer, rien à plaquer, on laisse faire et cela vient ou cela ne vient pas. C’est de toutes les façons parfait, votre inconscient se fait toujours le reflet de là ou vous en êtes et il ne vous emmènera pas au-delà de ce que vous êtes en mesure d’assumer. Et s’il vous faut plus de temps et d’autres allers/retours, alors ainsi-soit-il. Par exemple, vos images intérieures, en accord avec vos émotions et ressentis, face à la même situation d’envie de vomir, peuvent devenir : » je me vois avec une sorte de bâillon en caoutchouc (ou tout autre matière…) qui me barre la bouche et une moitié du visage et rien n’arrive à sortir, je sens que j’ai du mal à respirer, j’ai l’impression d’étouffer… » alors OK, cette image a au moins le mérite de faire le Polaroïd de l’état des lieux, une mise en forme très claire de la problématique qui vous permettra enfin de trouver une solution un peu plus tard dans la séance, ou lors d’une autre tentative. Ce qui deviendra alors par exemple, à un autre moment : « Il y a des ciseaux qui apparaissent et qui coupent le bâillon, un énorme cri sort de ma poitrine et je vois comme un grand courant d’air qui balaye la scène sans blesser personne, cela me fait du bien, je me sens comme rassuré, beaucoup plus calme.. » etc.. il n’y a pas de limites à ce type de voyage, vous irez toujours là ou vous aviez profondément besoin d’aller, même si vous n’en aviez pas clairement conscience.

4) Essayez par vous même, il n’y a que le premier pas qui coûte…

Maintenant, vous avez les bases, le reste nécessite d’expérimenter par soi-même, à partir d’un dégoût, bien sûr, mais aussi pour n’importe quelle sensation ou émotion de départ. Je pourrais vous décrire à l’infini le type d’images et de descriptions qui viennent aux personnes et qui ne cessent de m’émerveiller tant le pouvoir créateur de chacun est ici à l’oeuvre dans sa très grande puissance de métabolisme, de guérison et de réconciliation avec « Soi m’aime ». Je développerai ailleurs la question des états de conscience modifiée qui peuvent accompagner de manière très naturelle ce type de travail. Ces états que l’on va résumer pour l’instant sous le terme de « transe », ne sont pas à craindre et, au contraire, sont capital pour l’évolution des personnes. Ce sont des états, que je préférerai personnellement appeler « états de conscience augmentée » et qui sont une porte extraordinaire sur des mondes inconscients qui n’attendent que notre exploration et notre ouverture d’esprit pour nous aider à mieux évoluer dans nos vies…

NB : J’ai parlé d’inconscient, mais comme je suis ouvert spirituellement à beaucoup de systèmes de représentation, vous pouvez, dans le type de travail que je propose, transposer tous les types de croyances personnelles qui sont les vôtres. Car peut-être bien que lorsque je dis que votre « inconscient » vous souffle les solutions (si vous acceptez de lui prêter attention), rien ne dit que ce qui souffle n’est pas ce que l’on appelle un Esprit, un Guide, une Entité, un Ange ou finalement tout simplement le « Principe Divin » qui est à l’oeuvre en chacun de nous. (à méditer…)

NB : dernière chose, et je vous laisse y réfléchir aussi… Dans mon expérience, il s’avère que la nausée, en langage « inconscient », est souvent l’alter ego de l’injonction intérieure « n’osez »…

P.A.M

à relire… A quoi sert le dégoût? Chap I

A quoi sert le Dégoût? Chapitre II.

Psychothérapie du Dégoût, Psychothérapie de la Culpabilité, Psychothérapie de la Dépression, Psychothérapie de l'Angoisse.
Pascal Acklin Mehri, Psychologue Psychothérapie Paris

A quoi sert le Dégoût ? Chapitre II.

Dégoût et Loi Universelle!

Le Dégoût, en règle générale, est associé dans sa représentation psychologique, au rejet et à la distanciation. Son corollaire « positif » est l’Attraction qui mène souvent vers une représentation psychologique du désir et de l’appropriation. Ainsi, le couple dégoût/attraction est facilement associé avec le couple rejet/désir. Ce qui en langage mental peut vite être traduit par « je suis aimé » ou « je ne suis pas aimé ».

Notez que l’attraction que l’on ressent ou suscite peut être quelque fois aussi difficile à recevoir que le dégoût que l’on vit ou dont on fait l’objet. Et ceci est dû justement au fait qu’on les associe implicitement au couple rejet/désir, ce qui ramène en fin de compte toujours et encore à la question de base « être ou ne pas être aimé ». Remarquez au passage que quel que soit le mot, aimé, désiré, rejeté, leur association avec la question « être ou ne pas être » leur donne une résonance existentielle particulièrement dramatique selon le degré d’adhérence à cette association. Si je pense que ressentir du dégoût au contact de quelqu’un implique de le rejeter et donc de nier son existence, cela devient un traitement violent que je ne veux ni subir ni faire subir. Et me voilà coincé(e) avec une émotion puissante que je ne peux que refouler ou exprimer violemment. Ce type d’impasse est particulièrement « énergivore » et « dépressogène ».

Alors arrêtons-nous un instant et parlons de répulsion au lieu de dégoût. Ce sont deux mots qui s’associent parfaitement, car la répulsion exprime encore beaucoup plus complètement, dans sa dimension corporelle, ce que le dégoût provoque en nous intuitivement, dans nos tripes, du besoin de repousser ou de s’éloigner de quelque chose ou de quelqu’un. Nous voilà avec une autre version de notre couple Désir/Rejet qui serait alors Attraction/Répulsion. Or il se trouve que le phénomène d’Attraction/Répulsion est à la base autant de notre Système Solaire que de l’organisation et de l’équilibre atomique. Que ce soit sur le plan macro-cosmique des planètes ou micro-cosmique des molécules et atomes, tout trouve sa cohérence sur de savantes interactions d’attraction et de répulsion. L’être humain constitué d’atomes et existant sur une planète au milieu d’un Univers, est inévitablement aussi le jouet de ces interactions internes et externes. On parle de l’Attraction Universelle qui est un phénomène qui n’existe obligatoirement que couplé à un phénomène tout aussi universel de Répulsion. Comme le mental humain est branché sur une vision artificielle du positif et du négatif, on ne parle jamais du phénomène de Répulsion Universel. Pourtant l’un ne va pas sans l’autre ; pensez un instant que s’il n’existait que de l’attraction, tout serait très vite agglutiné en une masse de plus en plus informe et compacte, une fusion, incompatible avec la vie.

Selon moi, Désir et Dégoût sont les pendants des lois universelles de l’Attraction et de la Répulsion. Dans leur version psychologique, malheureusement elles prennent, chez l’humain, par le filtre du mental, une teinte positive ou négative. Mais a-t-on jamais vu la Terre se plaindre de la distance que la Lune a prise ce soir-là, et que se passerait il si les deux n’était qu’attirées l’une par l’autre? Ou encore si une molécule pouvait se sentir mal car d’autres molécules n’ont pas voulu interagir avec elle ?!? Dans la nature, le couple Attraction/Répulsion est un phénomène parfaitement adapté au fonctionnement de l’Univers. Nous faisons partie de cet Univers, comment pourrions-nous considérer ce phénomène autrement que parfait pour nous aussi ?

Et si, comme toutes les émotions qui nous traversent, le sentiment d’attraction ou de répulsion était l’expression de phénomènes d’une portée bien plus puissante et importante qui dépasse de loin la pauvre interprétation psychologique responsable de nos principales difficultés, à les vivre plus librement et plus simplement ?! Comme je l’avais déjà souligné dans l’article précédent, si l’on enlève la représentation moralisante « négatif ou positif » alors on se retrouve uniquement avec un phénomène universel à écouter ABSOLUMENT. Car écouter et prêter attention résout instantanément cette putain d’équation « être ou ne pas être ». Il n’y a plus de question dés que je suis présent à moi-même, car dès que je ressens, je suis ! Et si je suis dans l’instant présent de ce que mon corps, et l’univers au travers lui, m’informe, je suis alors au contact de la seule information qui me soit capitale (infiniment plus importante que le 20 heures…) pour suivre ou reprendre la seule direction nécessaire de mon existence. Si je suis mal (mal-être), ce n’est donc pas parce que je ressens du dégoût ou de l’attraction, mais parce que je ne sais pas (ou plus) accueillir sans juger l’inconfort premier d’une énergie puissante qui me traverse, pour la laisser me guider dans la direction d’une réalisation plus profonde de moi-même.

Changer de cadre de représentation est souvent en psychothérapie la base nécessaire pour débuter un changement dans sa vie. Et si, pour débuter ce changement, vous acceptiez de regarder vos émotions, et même le dégoût, dans un cadre et un point de vue radicalement différent de celui qui mène à « lutter contre » ? J’espère avoir contribué à ma manière à vous aider à aller dans ce sens. Alors quand vous ressentirez du dégoût, la prochaine fois, rappelez -vous que, comme dans l’espace intersidéral ou dans l’infiniment petit, si je m’éloigne de quelque chose, c’est obligatoirement que je me rapproche d’autre chose, même si je ne sais pas encore ce que c’est. Et chez les humains cela veut dire s’éloigner du connu auquel on se croyait attaché pour se rapprocher de l’inconnu auquel on aspire même secrètement…

A bientôt,

P.A.M

à relire… « A quoi sert le Dégoût », Chapitre Premier.

A quoi sert le Dégoût? Chapitre I.

Psychothérapie du Dégoût, Psychothérapie de la Culpabilité, Psychothérapie de la Dépression, Psychothérapie de l'Angoisse.
Pascal Acklin Mehri, Psychologue Psychothérapie Paris

Psychothérapie du dégoût !

Si vous avez l’habitude de lire mes articles, vous commencez à comprendre que l’Estime que je porte au Soi m’amène naturellement à respecter tout ce qui nous vient de l’intérieur, tel que cela se manifeste dans le Corps, comme une source de guidance. Et même si son premier effet est désagréable et non souhaité, comme la douleur ou la maladie, cette guidance ne nous veut que du bien et ne sert, si on apprend à l’écouter et l’apprivoiser, que le meilleur. Il s’agit toujours, pour l’inconscient et le corps, de nous emmener vers une plus grande conscience de nous-même.

Ainsi, comme je l’ai déjà écrit, la Douleur, l’Angoisse, la Dépression, la Culpabilité ne sont ni un défaut, ni une erreur, ni une punition, mais de puissants et salvateurs signaux d’alerte mis à notre service par la Nature. « Lutter contre », qui est la stratégie actuellement et malheureusement la plus répandue, est alors le ticket perdant d’un voyage sans issue. Plus vous luttez contre un phénomène naturel, plus vous le renforcez, car l’univers sera toujours plus fort que votre représentation mentale du bien et du mal. Plus vous « luttez contre » et plus vous dites secrètement à ce message intérieur universel que vous décidez de ne pas l’écouter, de le dévaloriser et de n’en faire qu’à votre tête. N’en faire qu’à sa tête, en langage d’une humanité déconnectée d’elle-même, c’est souvent dire que l’on ne veut fonctionner que selon les schémas stéréotypés d’un mental qui ne veut reconnaître ni Dieu ni maître et, ce faisant, par manque d’humilité face à la puissance de tout ce qu’il ne maîtrise pas, se précipiter la tête la première contre le mur de ses prétentions. Ici vous avez le résumé du cercle vicieux d’une humanité en détresse qui plus elle lutte contre les messages internes qui pourraient la guider vers ses aspirations plus profondes, plus elle se déconnecte, et plus le message augmente en violence (douleur, angoisse, culpabilité, crise, etc.) et se renforce.

L’autre attitude, plus humble à mon avis, c’est de commencer à accepter les messages même s’ils nous sont désagréables et de commencer à envisager qu’ils recèlent peut-être une vérité qui nous serait bien nécessaire pour avancer de manière plus évoluée et plus consciente dans notre existence.

Dans cette optique, observons par exemple aujourd’hui le « DÉGOÛT« .

Dans la logique que je propose, qu’elle pourrait bien être l’utilité du dégoût ? L’approche classique à laquelle tout monde est habitué en fait généralement une sensation considérée plutôt comme négative, et donc un vécu que l’on va vouloir fuir, ou lutter contre, surtout si l’on juge non avenu ou immoral, voire incompréhensible, de ressentir cela.

Qu’en est-il alors si l’on examine le dégoût par le prisme d’un regard plus positivement respectueux ? Tant que cela concerne un détritus sur la chaussée ou de la nourriture frelatée, on comprends l’utilité du sentiment de dégoût qui nous permet simplement de nous éloigner d’une situation ou d’un aliment néfaste pour notre organisme. Mais si cela concerne une situation qu’on ne peut éviter comme son lieu de travail, ou des personnes de sa famille, ou son couple que l’on est sensé aimer, cela peut même se doubler d’un sentiment de culpabilité qui rend le vécu encore plus désagréable. Bien sûr, comme je l’ai expliqué plus haut, dégoût et culpabilité augmentent, soit en « sourdine » (avec des évitements inconscients…) soit « bruyamment » par des symptômes divers, au fur et à mesure que l’on tente la carte de l’oubli, de la répression ou du refoulement. Car travail, patron, conjoint(e) ou famille sont en général liés à des situations que l’on ne peut éviter indéfiniment et dont la confrontation est amenée à se répéter régulièrement jusqu’à ce qu’un véritable changement conscient s’exprime d’abord et se réalise ensuite. Alors, si l’on enlève les notions morales de bien ou de mal, pourquoi donc face à une situation de vie ou un être humain (étranger ou connu, amical ou inamical…) le dégoût ne serait pas, là aussi, la manifestation saine d’un besoin d’éloignement qu’il serait tout aussi important de valoriser ? Et donc pourquoi ne pas considérer le dégoût de la même manière que le dégoût d’un aliment pourri qu’il serait autrement dangereux voire toxique d’introduire dans son organisme ou dans son environnement ?

Bien sûr, quand il s’agit d’un collègue, d’un ami, de son boss, de son couple ou de sa famille, il est plus difficile d’accepter le dégoût à cause des conséquences contradictoires que cela peut entraîner, ou que l’on imagine que cela entraînerait. Pourtant, si dégoût rime avec besoin d’éloignement, cela n’implique pas forcément ni conflit, ni séparation définitive (quelquefois oui…). Une fois écouté et mieux accepté, cela peut être tout simplement momentané, ou le redevenir. Ainsi on peut reconnecter avec des besoins ponctuels d’éloignement qui ont finalement pris la puissance du dégoût car on les a peu ou pas écoutés jusqu’à présent. De la même manière il peut s’agir du signal d’alarme d’une non-écoute prolongée de certains besoins fondamentaux qui définissent les conditions dans lesquelles la rencontre avec ces personnes, lieux ou situations seraient possibles. La nausée ou l’envie de vomir sont souvent liées à des choses mal digérées, mal métabolisées, coincées comme une boule dans la gorge entre non-intégration et non-expression. Envie de vomir et envie d’exprimer refoulées sont indissociables dans la sensation de dégoût.

Bien des « choses » peuvent être ainsi secrètement à l’oeuvre derrière une sensation de dégoût. Qu’est-ce qui me rebute dans mon travail que je pourrais commencer à adapter en écoutant les besoins qui se cachent derrière ce « dégoût » ? Il se peut que je n’accepte pas qu’il est temps de changer, car j’ai par exemple peur du changement; mais à force de tergiverser, la pression inconsciente intérieure devient de plus en plus forte. Quels sont les besoins que je n’écoute pas quand je vais voir tel ou tel de mes proches, à commencer par : « Avais-je vraiment envie de le ou la voir ce jour-là ? ou de les voir tout court en ce moment ? Peut-être que j’ai peur qu’il ne m’aime plus ou qu’il se sente rejeté et blessé si je ne réponds pas à la demande, ou tout simplement que je ne peux pas admettre le mal qu’ils me font car un éloignement impliquerait que je me retrouve seul. Combien de fois et depuis combien de temps ne me suis-je pas autorisé(e) à dire « non » même si c’est mon boss ou quelqu’un d’autre que j’aime ? Peut-être que dire « non » et affirmer mes besoins est pour moi synonyme de conflits et de complications, alors je m’éloigne de moi-même pour ne pas faire de vagues et mon sentiment de dégoût pour telle personne, telle situation, ou moi-même, augmente avec ma négation de tous ces besoins existentiels élémentaires.

Et puis lorsque cela arrive et que l’on est pris par surprise, on se demande d’abord pourquoi le dégoût peut-il émerger avec un travail ou des personnes que l’on est sensé(e) aimer ? Parce que, même si vous adorez les spaghettis bolognaise, ou la glace au chocolat, le sentiment de rejet et de dégout viendra immanquablement si l’on vous force (ou que vous vous forcez vous-même) à en manger plus que de raison, ou quand ce n’est pas le moment ou tout simplement que vous n’avez pas faim. Ce sont les conditions dans lesquels on les reçoit qui peuvent entraîner un rejet profond même des plus beaux cadeaux. Si dégoût il y a, alors, dans la logique où notre corps ne s’exprime pas pour rien, il est clair que ce que l’on vous propose, même un « cadeau », n’est pas fait pour vous ou que les conditions dont vous avez besoin ne sont pas réunies pour pouvoir digérer et accueillir les choses d’une manière plus bénéfique. Et, par votre corps, votre inconscient est votre meilleur guide pour savoir ce qui est bon pour vous. Et si votre dégoût se porte sur le magnifique séjour au ski offert avec beaucoup d’amour par votre adorable grand-mère, ou le nouveau poste à responsabilités sur lequel tous vos collègues saliveraient, il va falloir écouter, même si les autres et vous-même avez du mal à comprendre pourquoi.

En résumé, et pour simplifier, écouter son dégoût revient à mieux définir ses besoins, dont celui d’éloignement, en même temps qu’une meilleure définition des conditions de bonne acceptation d’un événement ou d’une situation, ou d’un rapprochement possible avec une ou des personnes. Dans le cas par exemple d’un parent ou ami avec lequel le lien est fort mais aussi « toxique » cela peut être tout simplement, si l’on doit se voir, de le faire dans un lieu et pour une durée qui vous convienne le mieux possible. Limiter et circonscrire les conditions d’exposition à ce qui génère le dégoût peut suffire à en diminuer l’intensité car « l’alerte » aura été écoutée. Si le dégoût persiste, c’est que vos besoins fondamentaux concernant cette situation ou cette personne n’ont pas encore été mis a jour.

La difficulté suivante, c’est qu’une fois que l’on commence à prendre conscience de son dégoût, et de l’importance de ne pas aller à l’encontre de ce signal primordial, reste encore l’art et la manière de le valider auprès des autres et surtout quand les personnes concernées sont importantes ou proches. Il y a bien sûr une différence entre « écouter » son sentiment de dégoût et dire à quelqu’un « tu me dégoûtes ! ». il s’agira plutôt de s’écouter et de dire (ou au moins de se dire à soi-même) « je ressens qu’en ce moment ce n’est pas ce dont j’ai besoin ! ». Et même si c’est mon boss, mon conjoint ou mes parents, si vous prenez le temps de valider votre dégoût, ce n’est plus qu’une question de temps, avec l’expérience, pour trouver la forme la plus adéquate, la plus respectueuse de vous -même et de l’autre, pour exprimer ce que le dégout a révélé. Ici, la sensation de dégoût qui vous a ouvert les yeux n’a plus besoin d’être partagée, et avec un peu d’exercice de confiance en Soi, cela peut devenir « ce ne sont pas les conditions de travail que je souhaite », « je vous aime mais je ne viendrai pas vous voir ce week-end, car j’ai absolument besoin de ce temps de repos seul avec moi-même ou avec d’autres personnes », « vous êtes mon père (ou ma mère), mais la difficulté actuelle de nos relations implique que je prenne mes distances pour un temps », « je ne remets pas en question votre autorité de directeur, mais je ne peux accepter que vous me manquiez de respect de cette manière » ou encore « j’aimerais beaucoup répondre à votre demande, mais cela nécessiterait certaines conditions qu’il va d’abord falloir réunir », etc. De tels résultats n’arrivent que lorsque vous avez pris le temps du recul, de l’acceptation et de la transformation de l’information existentielle portée par votre dégoût…

P.A.M

à suivre… A quoi sert le dégoût? Chapitre deuxième, « Attraction et Répulsion »…