Contes pour l’Enfant Intérieur. « Albert le Coléoptère »

Cabinet de Psychothérapie. 7 rue Pierre Haret, Paris 9. Conte pour l'Enfant Intérieur, Albert le Coléoptère.
Cabinet de Psychothérapie. Au carrefour de Paris 8, Paris 9, Paris 17 et Paris 18

Contes pour Enfant Intérieur

« Albert, le Coléoptère »

Albert n’est pas très fier, c’est un coléoptère. Héritier d’une histoire qu’il voudrait qu’on enterre, il est le fils de son père, ce dont il ne sait que faire. Albert a honte de lui, de ses origines, de sa terre, la couleur de sa peau, la forme de son front, lui font vivre un enfer. Cette terre qui lui colle jusqu’au bout de ses pattes laissent des traces dans son coeur et sa peau écarlate. Albert a connu la misère et la guerre, arraché d’un pays dont il ne se souvient guère. Pour éviter la prison et les fers, sa famille est venu chez nous, en Charter.

Albert a tout fait, tous les métiers pour pouvoir étudier, pour ne pas démériter et pouvoir s’intégrer. Il a fallu se battre, au propre comme au figuré, contre les avis et tous les préjugés. Comment se faire aimer, lui, le déraciné ? Comment se laisser vibrer quand on est désaccordé ?

Albert est alarmé, toujours en danger, jamais vraiment protégé, il trouve dans la loi, les règles et son métier, le chemin qui le guide et lui évite de sombrer. Son dieu, il lui vient d’ailleurs, sa spiritualité apprise par coeur, celle qui le maintient droit lorsque les autres le raillent, celle qui le garde en vie quand tout autour déraille.

Albert est un fantôme, une fleur sans arôme, un enfant sans caresse qui s’abrite et se stresse, fait bien son boulot, pas de vagues et très peu d’eau. Enfant il a fui, un soleil, un pays, et depuis tout petit déjà, dans la survie, il fait taire ses envies et se préserve meurtri, tout au fond de lui. Derrière le miroir gris où il s’abrite, il ne donne plus rien à voir et garde à l’intérieur, ses origines, son esprit, ses espoirs et ses cris.

Après une dépression, il a touché le fond, plus possible de lutter, ou de travailler. Il a dû s’arrêter et se blottir en lui, tout contre lui, enroulé comme un bébé, s’écouter dormir et respirer. Ce bébé, ce beau bébé, cet enfant silencieux d’abord, puis bruyant, criant, turbulent, et puis après quelque temps, souriant, enfin, vivant, de nouveau vivant.

De plus en plus clair il s’est vu, nu, sans fardeau, le poids d’un héritage dissous dans de l’eau, beaucoup d’eau. Une guerre sans attaches qui ne lui appartient pas, des armes qui fondent comme des sucres au gré de ses larmes qui se fâchent, et une histoire, des bagages qui, petit à petit, s’allègent et se lâchent. Alors ses gênes sans gênes, sans obligations, désormais s’expriment, sans devoirs ni programmes, comme un musicien inventant ses gammes, libre d’improviser hors du cadre et de toute son âme.

Albert le Coléoptère ne peut plus se taire, à sa grande surprise il a découvert en lui une nouvelle terre. Un nouveau point d’appui, où il a repris le goût aux fruits de son pays, redécouvert les sons, la musique et l’écrit. Sa langue se délie, ses paroles s’envolent et son coeur rigole. Des racines dans les pieds et des ailes dans les yeux, Albert nous parle de Dieu. Celui des êtres libres et heureux. Il est devenu professeur et de la paume de ses mots transmet aux plus jeunes son histoire, ses blessures et ses baumes, ses théories les plus folles, sur la Vie, le Divin et les Hommes…

P.A.M

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