L’Enfant Intérieur, Chap II.
Beaucoup de personnes pensent que ce contact avec l’enfant intérieur implique d’emblée de pouvoir lui témoigner de l’affection et de l’amour. Quand ils essayent, soit ils plaquent des réponses aimantes qui sonnent alors creux, soit ils perçoivent clairement qu’ils n’y arrivent pas. Ils en déduisent que le processus est un échec et restent avec ce sentiment d’impasse et d’impossibilité de connecter avec eux-mêmes. Et même s’ils ressentent bien l’existence de cet enfant intérieur, ils restent bloqué(e)s avec cette idée qu’il ne savent pas quoi en faire.
Alors qu’en fait, « savoir quoi faire » avec son enfant intérieur n’est pas primordial dans un premier temps. La plupart du temps, si nous ne sommes pas à l’écoute initialement, c’est justement parce que nous ne savons pas quoi en faire. Il est donc tout à fait normal de commencer par ce sentiment lorsque l’on reprend le contact. C’est donc souvent la première chose avec laquelle il faut entrer en connexion et l’accepter en explorant plus avant ce que cela nous fait, d’être ainsi impuissant et peut-être vulnérable.
Comme cet enfant est aussi nous-même on peut alors tenter de percevoir ce que cela lui fait à lui, de nous voir ainsi impuissant. En fait c’est un sentiment que l’enfant connaît bien puisqu’il l’a souvent exploré avec les adultes, comme avec ses parents par exemple. Dans la plupart des cas, même avec des parents aimants qui ont fait du mieux qu’ils pouvaient, s’il y a symptôme, c’est que quelque chose a manqué dans l’écoute et l’accompagnement de certains besoins émotionnels et existentiels profonds de l’enfant. Donc, en résumé, nous ne savons pas « quoi en faire » car nous n’avons pas eu l’accompagnement nécessaire pour nous apprendre.
Souvent l’on comprend que l’on a manqué de quelque chose et l’on reste bloqué à cette étape, dans le reproche et la déception : « Je n’ai pas eu ceci ou cela, on ne m’a pas donné, compris, accompagné etc. », ou face à notre compagnon avec lequel se rejouent tout ces vieux scénarios : « Tu ne me comprends pas, tu ne me donnes pas ce dont j’ai besoin, tu ne m’aimes pas, etc. ». Connecter avec son enfant intérieur c’est alors aussi, une manière de sortir de ces reproches qui nous enferment, de cette attente sans cesse déçue car tournée vers l’extérieur qui nous place dans une boucle sans fin, et sortir alors de la victimisation qui en résulte.
Car tenter le lien avec son enfant intérieur, c’est alors reprendre la responsabilité de cet accompagnement qui nous a fait défaut. Et comme l’on ne peut pas savoir ce que l’on n’a pas appris il va falloir partir de là et commencer à innover, inventer, même si cela veut dire assumer d’abord un moment d’inertie et de tétanisation. Nous devenons alors exactement à ce moment là l’adulte qui peut écouter et ressentir pleinement le besoin de cet enfant que nous avons été, et qui a attendu tout ce temps pour nous rencontrer. Non pas forcément avec la solution clé en main, mais avec la capacité de reconnaître son impuissance, tout en montrant sa volonté d’essayer, de chercher et potentiellement capable d’inventer une solution unique et sur mesure. Car pouvoir faire face à cet enfant que nous avons été et lui dire » je suis tétanisé, j’ai peur, je ne sais pas comment faire, j’aimerais essayer et peut-être trouver petit à petit comment faire… » CELA CHANGE TOUT !
En effet, la plupart du temps, face à cette impuissance non dite, non assumée chez l’adulte, nous avons intégré, plus ou moins inconsciemment quand nous étions enfant l’idée d’un rejet et d’une dévalorisation de tout ou d’une partie de nous-même. Car nous ne pouvions pas, à l’époque, l’interpréter plus simplement comme une incapacité de notre environnement à accompagner nos besoins spécifiques. Cela est devenu dans le langage inconscient de l’enfant : « Mon émotion, ce que je pense, ma question, mon intérêt, mon besoin, ce que je suis ou une partie de ce que je suis, ne mérite pas de réponse, de reconnaissance ou d’accompagnement, cela n’a donc probablement pas de valeur et n’est pas aimable, voir franchement détestable, nul et non avenu… »
Alors imaginez l’effet pour un enfant si au lieu de se retrouver face au silence, à l’absence, au tabou, au reproche ou à l’interdit de l’adulte, il trouvait face à lui quelqu’un qui lui dise : « Je ne sais pas comment faire mais je vais essayer et ensemble peut-être allons-nous trouver une solution… ». VOUS POUVEZ ÊTRE CET ADULTE ! L’enfant par cette seule réponse (il faut qu’elle soit faite dans la sincérité du coeur…) comprend en même temps qu’il n’est pas seul face à l’émotion, la question ou la situation qu’il vit, et surtout que si on ne lui répondait pas ou mal, ce n’est pas parce que son émotion, sa question ou son vécu ne sont pas aimables, mais parce que l’adulte en face ne sait pas « quoi en faire » et que cela le met dans une situation d’impuissance qu’il a du mal à gérer. Communément, un adulte mis dans cette situation à tendance à fuir, éluder, ou attaquer par le reproche et la culpabilisation voire pire selon la répétition éventuelle de sa propre enfance mal digérée…
Au moment même ou vous faites face honnêtement à cette impuissance en vous adressant consciemment à votre enfant intérieur et en acceptant qu’il va peut-être falloir du temps, vous faites cesser tout cela et vous ouvrez la porte à l’écriture et à l’invention d’une histoire toute nouvelle pour cet enfant et donc pour vous-même.
La suite, sur cette nouvelle base, est affaire de temps et d’écoute progressive…
(à suivre… « Qu’est ce que l’Enfant Intérieur? » Chapitre III)